Chant

    Quand j’ai commencé à chanter, ma voix était littéralement prisonnière de mes blocages. On m’entendait à peine à quelques mètres. Je me souviens de mes premiers spectacles à la Chant’août! Fallait tendre l’oreille! J’avais étudié le chant à l’École de Musique, qui était l’équivalent du Cegep en musique aujourd’hui, mais ce n’est que plus tard, quand j’ai rencontré Louis Spritzer, que j’ai vraiment entrepris un travail sur ma voix. M. Spritzer enseignait à l’époque à l’École Nationale de Théâtre et au Conservation d’Art Dramatique de Montréal. Il donnait des cliniques à Stratford et en Allemagne, et avait aussi enseigné la guitare à la Faculté de Musique de McGill. Ses cours de chant étaient très particuliers. Sa formation prenait ses sources dans la bioénergie. Or, la bioénergie étant fondée sur la gestion de l’énergie, le travail se faisait donc plutôt au niveau de la libération des tensions.
     
    J’ai bénéficié de son enseignement pendant plus de 4 ans. On ne chantait pas beaucoup dans ses cours. Ce n’était pas exactement l’endroit pour pratiquer des chansons, mais pour libérer l’énergie qui permet de faire vibrer le son de sa voix dans l’ossature jusqu’à l’âme. Cette approche favorise l’accès à toutes les fréquences d’une voix, de sa palette de couleurs, en plus de nous connecter aux vraies émotions et à une liberté d’expression accrue et personnalisée. C’était surtout de prendre conscience de l’effet de nos pensées sur notre corps, puisque chaque pensée agissant sur notre plexus solaire modifie toute l’attitude de l’être. Une gestion de la pensée pour faire en sorte que seule l’énergie nécessaire soit déployée, car l’énergie inutile est une perte qui freine ou bloque l’expression. Travailler avec une musculature ni molle ni tendue mais agréable. Des exercices de souplesse, de lâcher-prise, pour les yeux, le plexus solaire, etc. Effectivement, c’était très particulier comme cours de chant. Quelle belle synchronicité que d’avoir rencontré cet homme exceptionnel!
     
    Dans mon enseignement, je ne pouvais pas appliquer sa méthode (philosophie) de façon intégrale, parce que la motivation première des élèves est de chanter des chansons, et c’est tout-à-fait compréhensible. C’est comme de vouloir apprendre à conduire pour se déplacer en toute liberté et vouloir apprendre à conduire dans le but de se rendre en formule 1, ce qui demande une connaissance de la mécanique pointue et de une gestion de l’énergie autant de la voiture que de soi-même…
     
    Chanter professionnellement est très exigeant et de plus en plus… Dans toutes les autres disciplines on peut toujours dire : ‘aujourd’hui je n’étais pas dans le meilleur de ma forme’, mais pas en chant. Et considérant que la voix est directement connectée à nos états d’âme, la barre est haute.
     
    Mais y a rien de plus entier que ces moments de grâce quand la connexion se fait au-delà de l’égo et que la voix suit librement le fil des vibrations.